JONATHAN FRANZEN
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JONATHAN FRANZEN
Crossroads
Traduction de l'anglais (Etats Unis) de Olivier Deparis

"Elle lut pendant tout le trajet jusqu’à Phoenix, puis, dans un second avion, pendant tout le trajet jusqu’à Albuquerque. Elle ne termina pas tout à fait ce livre, mais peu importait. Le rêve d’un roman était plus résistant que d’autres formes de rêve. On pouvait l’interrompre au milieu d’une phrase et y revenir plus tard. "

Editions de l'Olivier, 2022


Editions de l'Olivier, 2020

JONATHAN FRANZEN
Et si l'on arrêtait de faire semblant?
Traduction de l'anglais (Etats Unis) de Olivier Deparis

"Je partage avec ceux-là mêmes qu'égratignait mon essai, le constat que le réchauffement climatique est le problème de notre temps, peut-être le plus grand de toute l'histoire de l'humanité. Nous voici dans la position des Amérindiens quand les Européens sont arrivés avec leurs fusils et leur variole : notre monde est à la veille d'un changement de grande ampleur, imprévisible mais en grande partie pour le pire. Je ne nous crois pas capables d'empêcher qu'il se produise. tout ce que j'espère, c'est que nous pourrons accepter l'inévitable à temps pour nous y préparer humainement, car je suis convaincu que l'affronter sans nous voiler la face, si douloureux que ce soit, vaut mieux que de le nier."

"L'Albanie a été un temps annexée par l'Italie, et de nombreux Albanais continuent de voir les Italiens comme des modèles de sophistication et de modernité. Outre les dégâts immédiats considérables qu'il cause à l'Albanie, le tourisme de chasse italien a introduit à la fois un esprit de massacre systématique et de nouvelles méthodes pour l'accomplir - en particulier l'usage d'enregistrements, d'une efficacité catastrophique pour attirer les oiseaux. Même dans les villages les plus reculés, les chasseurs albanais ont à présent des MP3 de cris de canard sur leurs téléphones portables et leurs iPod. Cette nouvelle sophistication, ajoutée à un nombre de fusils de chasse estimé à cent mille (dans un pays de trois millions d'habitants) et à une surabondance d'autres armes utilisées de matière opportuniste, a transformé l'Albanie en gouffre géant pour la biomasse migratoire d'Europe de l'Est: des millions d'oiseaux y rentrent et très peu en ressortent vivants."


Editions de l'Olivier, 2018

JONATHAN FRANZEN
Phénomènes naturels

"Il existe une odeur spécifique, une odeur ancienne, humide et mélancolique, qui se dégage de Boston après le coucher du soleil, lorsque la température est fraîche et qu’il n’y a pas de vent. La convection la ramasse sur les eaux écologiquement perturbées de la Mystic et de la Charles, ainsi que des lacs. Les filatures à l’abandon et les aciéries en sommeil de Waltham la diffusent. C’est le souffle expiré par ses vieux tunnels, l’esprit qui s’élève des amoncellements de verre terni par la pollution et du ballast des vieilles voies ferrées, de tous ces lieux silencieux où la fonte rouille, où le béton pourri s’effrite comme un Roquefort inorganique, et où les distillats pétroliers retournent à la terre.
Dans une ville où il n’est pas une seule parcelle de terre qui n’ait été transformée, c’est devenu une odeur primordiale, l’odeur de la nature qui a remplacé la nature. Les fleurs continuent d’éclore, l’herbe tondue, les feuilles qui tombent et la neige fraîche continuent d’altérer l’air périodiquement. Mais leurs odeurs ne sont qu’une surimpression sentimentale ; elles sont plus jeunes que ces émanations patiemment accumulées par le dessous des ponts et les moellons de mille remblais, par les pontons créosotés qui s’avancent dans l’eau huileuse des voies navigables, par les feuilles du Globe et du Herald enroulées autour des rochers moussus des canaux de drainage, par l’intérieur de chaque boîte métallique noircie encore existante le long des voies de circulation abandonnées, leur fonction et la marque de leur propriétaire ayant été effacées par les intempéries, le trou de leur serrure bouché par la corrosion : l’odeur de l’infrastructure. "


Editions de l'Olivier, 2016

JONATHAN FRANZEN
Purity

"Elle avait pris l'habitude d'appeler sa mère au milieu de sa pause déjeuner chez Renewable Solutions. Ça la soulageait un peu de ce sentiment de ne pas être faite pour son travail, d'avoir un travail pour lequel personne ne pouvait être fait, ou de n'être faite pour aucune sorte de travail ; ensuite, au bout de vingt minutes, elle pouvait affirmer en toute honnêteté qu'elle devait retourner travailler.
- J'ai la paupière gauche qui tombe, expliqua sa mère. C'est comme s'il y avait un poids qui la tirait vers le bas, un plomb de ligne de pêche ou quelque chose comme ça.
- Là, maintenant ?"

 


JONATHAN FRANZEN
Freedom

"Il y a, pour un chat domestique, bien des façons de mourir à l'extérieur, comme le démembrement par un coyote ou le passage sous une voiture, mais lorsque Bobby, le chat adoré de la famille Hoffbauer, n'est pas rentré à la maison un soir de début juin, et que nulle trace de lui n'a pu être trouvée, malgré tous les appels, toutes les fouilles dans le périmètre de Canterbridge Estates, toutes les battues sur la route du comté, toutes les photos de Bobby punaisées sur les arbres du coin, on fut largement convaincu, dans Canterbridge Court, que Bobby avait été tué par Walter Berglund."

 

Editions de l'Olivier, 2010


Editions de l'Olivier, 2008

JONATHAN FRANZEN
La zone d'inconfort

"Il y avait eu une tempête à St. Louis, ce soir-là. L'eau stagnait dans des flaques noires fumantes sur le trottoir devant l'aéroport et, du siège arrière de mon taxi, je voyais des branches de chêne s'agiter sous les nuages bas de la ville. Les routes du samedi soir étaient empreintes d'une sorte de langueur convalescente: la pluie ne tombait pas, elle était déjà tombée. "

 


JONATHAN FRANZEN
La vingt-septième ville

"Autrefois, cette terre avait été un terrain de chasse pour le peuple de Cahokia, des Indiens d’Amérique qui eurent si peu de rapports avec le monde des Blancs venus plus tard des plaines de l’est, qu’ils semblaient, en disparaissant, avoir emporté le pays avec eux. L’Histoire vit et meurt dans l’architecture et les Cahokiens ne se servaient pas de pierre pour bâtir. De l’autre côté du fleuve, dans l’Illinois, et plus loin, dans le Missouri, ils avaient érigé en revanche d’immenses tumulus de terre qui leur survécurent et continuèrent de dominer les tribus arrivées après eux, tels les sommets usés d’une Atlantide engloutie. Mais là-haut, sur les collines, il ne restait quasiment rien des Cahokiens et seules des pointes de flèches témoignaient encore du passage plus tardif des Iowas, des Sauks et des Fox, ces Américains suffisamment modernes pour qu’on les appelle à tort des Indiens. "

Editions de l'Olivier, 2004


JONATHAN FRANZEN
Pourquoi s'en faire?

"Voici un souvenir. Par une matinée de mauvais temps, en février 1996, j'ai reçu un courrier de ma mère, à Saint Louis, un paquet de la Saint-Valentin contenant une carte de vœux romantiquement rose, deux Mr. Goodbar de cent grammes, un cœur rouge creux en filigrane sur une boucle de fil et la copie du rapport d'un neuropathologiste après l'autopsie du cerveau de mon père. "

Editions de l'Olivier, 2003


Editions de l'Olivier, 2001

JONATHAN FRANZEN
Les corrections

 " Gary aurait aimé que toute nouvelle migration vers les côtes soit proscrite et tous les habitants du Midwest encouragés à retrouver le goût des nourritures bourratives, des habits démodés et des jeux de société, afin de conserver une réserve nationale stratégique de nigauderie, une terre vierge de tout sens esthétique qui permette aux privilégiés, comme lui, de se sentir extrêmement civilisés à tout jamais…"